jeudi 13 mai 2010

De cochons, chevaux et autres cartes à papattes

Une dame vient de me passer devant dans la file. D'habitude ça me faire sourire, là je sens le rouge me monter aux joues et avant que j'aie réussi à me retenir, ça part tout seul : "dites, j'ai une tête de ticket périmé, là ?" Je vous l'accorde, ce n'est pas très spirituel, d'ailleurs ça n'a pas déridé la dame, mais là, zut. J'ai récupéré mes deux kilos de crevettes et fichu le camp toute zénervée.
Je sais pas pourquoi, ça fait une bonne semaine que j'ai les nerfs un peu à vif. C'est comme si j'étais en play-back et que la fée Clochette, celle de Disney, parlait à ma place une fois de temps en temps. C'est qu'elle a un fichu caractère, la fée Clochette de Disney, c'est pas une marrante, je peux vous le dire. Dites, docteur, c'est grave ? nan, pas la bronchite qui est revenue... Je veux dire, le caractère de trois petits cochons qui m'a poussé comme ça sans prévenir.
Peut-être bien aussi que je suis en train de piaffer d'impatience, là. Maintenant que le chemin est tracé et que je sais où je vais, j'ai du mal à rester à l'écurie, quoi. Encore quelques mois, si tout se passe comme prévu, et je prendrai régulièrement la route du Sud pour aller étudier du côté de la mer, celle où un non-Breton peut se baigner sans risquer l'hypothermie, dans une ville qui ressemble beaucoup à Rennes parce qu'il y a plein d'étudiants et de cinémas et de bars sympas et de gens qui aiment bien les huîtres et le petit vin blanc du coin et le nectar du Pic Saint-Loup et toute cette sorte de choses. C'est pas tout à fait Barcelone, mais c'est pas mal quand même. Une cafelière qui ressent l'appel du Sud, ça piaffe, c'est comme ça. Gentiment, hein, la plupart du temps je suis une cafelière ravie de voir les gens venir au Café Clochette, m'enfin je ne me voile plus la face, ça ne me suffit plus à me porter au quotiden, l'excitation quotidienne que j'aurai vécue pendant presque deux ans.
Cet après-midi, le monsieur de la chaudière est venu lui rendre visite pour s'assurer que je la traite bien. Ca m'a rappelé mes mésaventures trois jours après l'ouverture (clic, pour la nostalgie) et ça m'a bien fait rigoler d'y repenser, j'en suis presque requinquée. D'ailleurs la dame des crevettes, si ça se trouve, je la recroiserais ce soir, je lui offrirais un petit gâteau. Peut-être.
Heureusement, Aude est là. Elle réalise comme pas deux, entre autres, les macarons de Christine, me permettant ainsi de prendre quelques heures d'escapade momentanée, de rendre hommage à Christine qui est partie vaquer de son côté et qui nous manque, et de la féliciter chaleureusement pour ses talents de pâtissière en croquant dans un des petits gâteaux dont je ne vous dis que ça.
Et puis décidément, j'ai de la chance, j'ai toujours les clients les plus gentils du monde, ils me font crédit. Je sais, ça a l'air paradoxal comme situation, mais c'est bien vrai. Deux familles ont rempli la semaine dernière leur dixième carte de fidélité (ce qui nous fait quand même un total de 200 papattes à elles deux) et je suis en dette : je leur dois un livre de recettes, "Les jolies recettes du Café Clochette". J'ai le titre, mais à part ça c'est très décousu, encore. Alors j'ai beau me dire que la dette c'est la trame du tissu social, ça ne me convainc pas tant que ça sur ce coup-là et il va bien falloir que je me mette au boulot. Va falloir tricoter des papattes de devant, la cafelière.

1 commentaire:

fred a dit…

Qu'il est bon de sentir que des projets nouveaux t'animent... Et quand tu auras quitté les fourneaux du café, il existera toujours ? Et moi qui serai loin, je pourrai quand même t'envoyer des recettes de là-bas pour que tu les testes ?

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