mercredi 23 juin 2010

Nouvelle page, nouveau carnet

Train. Sur les affiches, une famille d'ours roupille béatement, un petit chien est sur le point d'être abandonné. Au buffet de la gare, place du 8 mai 1945, lamentations journalistiques en arrière-plan sur le thème du foot (mais la cafelière se réjouit de ce que l'équipe féminine, leader de son groupe, ait battu hier les copines, dixit un entrefilet dans un journal qui a bien changé depuis son dernier voyage en train), "aux choix" sur la carte (argh et sic) des desserts. Des costards wifitent, d'autres mot-croisottent. Sirotages divers de café 100% pur arabica de Costa Rica.
A l'arrivée, pas d'étourneaux cette année, ils sont en Afrique à cette époque. Un tram déboule et embarque l'héroïne vers son avenir. Le monsieur du café rigole "vous cherchez la fac ? comme tout le monde !" et la grille résiste un instant avant de céder le passage. Le fringant professeur, qui s'y connaît autant en multiplication qu'en partage, me fait visiter les lieux. C'est lumineux, chaleureux comme l'accent du Sud et serein comme un temple. La bibliothèque achève de me conquérir. Comment se démultiplier pour être ici souvent et ne pas quitter la vie d'avant ? cette question ne cesse de me hanter depuis des années.
Une baignoire minuscule et une robe qui laisse dépasser les papattes, dans l'espoir de leur donner quelques couleurs au soleil qui commence à baisser sans abdiquer. Fête de la musique, on sent comme une trépignation-trépidation dans l'air, la foule s'assemble et de dessemble vers le centre. Je déambule, autant pour le mot que j'aime que pour l'expérience. Hotels, folies, caryatides et pastilles. Accordages et accordéons. Sous un micocoulier, je m'attarde pour de roboratives moules-frites avec-un-verre-de-blanc et, comme aurait dit celui qui vécut ici mais n'y est plus (je le sais maintenant), ça le fait. Un monsieur dîne seul et nous échangeons un sourire de célibataire connivence. A la table d'à côté, une dame tient absolument à savoir "mais vous avez du Pic Saint-Loup ?". Le serveur, navré, avoue que non et tente de caser autre chose. Je me retiens très fort de tendre la carte du visite du Café Clochette où, oui madame, on sert du Pic Saint-Loup. Une esquisse de diagramme où surnagent quelques mots grecs (et un Samaritain, mais pas de raton laveur) et je repars. Ruelles, pierre blanche, portes austères et heurtoirs colorés.
La foule, à un moment, n'a plus qu'un seul coeur au rythme des percussions. Un arc de triomphe qui n'a plus besoin de triompher sert de point de repère aux réunis par la voix des ondes électromagnétiques et téléphonées. La place de la Comédie et l'Opéra accueillent une rumba sous la voix rauque d'un chanteur ibérique à guitare. Dans les petites rues, plus haut, c'est la nostalgie du rock qui se chante et se gratte. Les verres sont en plastique et les sourires charmés. Dans la cathédrale, le public retourne le dossier des bancs pour faire face à l'orgue. Une incongrue version de Flower of Scotland succède aux pompes et circonstances avant de mourir chez Bach. Près de la gare, c'est moins acoustique et plus sonore. Quelques-uns ondulent devant une stéréo.
La nuit est courte mais réparatrice et le retour au soleil change le visage de la ville. Il paraît qu'il fait frais. La Bretonne devenue craint les coups de soleil et marche à l'ombre. Deux jeunes à chien et dreadlocks disent venir du Nord : Nantes et Angers. Ils ont déjà les coups de soleil. Les serveurs aux terrasses ont l'air fatigué. Les chevaux de bois du manège se reposent de leur nuit agitée. Une commerçante me narre ses soucis de RSI, nous commisérons à nos aventures respectives.
Entrain. Livre neuf pour la route. Entre deux contemplations de l'intérieur de mes paupières, je regarde passer les veaux, tout petits, tout blancs et sûrement très doux à caresser entre les oreilles, mais ils passent trop vite pour que je puisse leur faire les trois poutoux à la montpellieraine. Le même journal qu'hier, édition actualisée, pavoise sur ses relations privilégiées avec un ténor de la mode qui en a fait un truc impossible à plier pour faire tranquille le sudoku du jour. A la réflexion, je n'ai pas tellement envie de réfléchir. S'il n'y a qu'une leçon à tirer du voyage, c'est de se laisser porter. Laisser flotter les mots et la parole qui vient.
Demain, c'est aujourd'hui.

4 commentaires:

Crocus a dit…

Oh ben moi je partirai bien en voyages avec toi et me laisserai aussi bercer par tes récits!
Bises?

BrightEyedMum a dit…

Love you so much !

Pascale a dit…

Un voyage en bande avec lecture des écrits du jour autour du feu de camp, en voilà une bonne idée... Chamallows grillés, quelqu'un ? Bises !

BrightEyedMum a dit…

Rhoooooooooo voui, les chamallows grillés !!!

Mon capchat ne me va pas : Nongouty, que ça dit... ;-)

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