Une maman, quelle que soit son occupation par ailleurs, ne cesse jamais de se demander si elle en fait assez pour son bébé. Avec joie, avec inquiétude, avec culpabilité et mauvaise conscience, avec légèreté ou pas... de toute façon la question se pose. Aujourd'hui, j'ai le coeur lourd parce que j'ai le sentiment d'avoir été une mauvaise maman pour mon bébé, pas celui auquel il faut racheter des chaussettes parce qu'il grandit tout le temps, l'autre, le Café Clochette. J'en vois déjà qui lèvent les bras au ciel en fourbissant des consolations. Ca ne change rien : il faut bien que j'en passe par là. Je n'ai pas tout fait pour le Café Clochette. Ca prendra du temps avant que je puisse me dire que de toute façon, je n'aurais pas pu en faire plus.
J'ai passé deux semaines extraordinaires d'angoisse, de changements de coeur, d'espoirs insensés, de lâchers prise. J'ai rencontré des gens étonnants. J'ai répondu à des questions idiotes. J'ai pleuré après le départ de certains qui venaient visiter cette maison pour l'acheter, comme si c'était une pomme de terre au marché qu'on soupèse avant de la jeter dans le sac. Certains faisaient du tourisme. Certains voulaient un placement. Certains cherchaient quelque chose sans savoir quoi. D'autres avaient des étoiles dans les yeux.
Parmi ceux qui se disaient intéressés par la reprise du Café Clochette, j'ai tout vu. "Oh vous inquiétez pas, quand les enfants seront couchés je ferai une quiche ou deux, ça ira très bien". "Mon mari fait très bien la cuisine chinoise". "Ouais, j'aime bien les enfants, surtout quand ils rentrent pas chez moi... enfin je veux dire... si si, en fait j'aime bien les enfants." "Mais si je ferme au bout de trois mois, c'est pas grave ?" "Il y a une employée ? ah zut, comment on fait pour virer quelqu'un ?" "Si je sais faire la compta ? ah oui, je manage une équipe de quatre personne, alors vous voyez !" "Mais pourquoi vous avez rien fait pour faire monter le chiffre d'affaire, ça doit pas être si compliqué quand même, je sais pas, faut ouvrir plus, non ?" Il y avait des retors, des naïfs, des rêveurs. Des enthousiastes à qui il aurait fallu quelques semaines de plus pour la réflexion... et qui auraient bien pu y arriver, si j'avais eu ces quelques semaines. Des fauchés aussi, qui espéraient que mon grand désir de voir survivre l'affaire me ferait offrir les murs à n'importe qui. Et vous savez quoi ? c'était presque vrai. Il y a eu quelques jours où je voulais juste passer la main et voir survivre le Café Clochette.
Il a fallu d'autres chocs du réel, comme dirait l'autre, pour réaliser que c'était impossible. Il y a eu, heureusement, des messages de soutien, des gestes d'amitié, une grande énergie déployée autour du Café Clochette. C'est bien ; c'est bien qu'on sache, tous, que cet endroit remplissait un besoin et qu'on ne doit pas se résigner à ce que rien de ne vienne prendre sa place. Un lieu qui reçoit des enfants, des familles, qui permet de créer des liens, de découvrir, de se reposer parfois, c'est indispensable. Que les pouvoirs publics le sachent, c'est important ; que ceux qui protestent sachent qu'ils sont nombreux à vouloir quelque chose, même sans savoir quoi précisément, c'est indispensable.
Ce ne sera pas, plus, au Café Clochette. Ce sera ailleurs. Quant à moi, finalement, j'ai peut-être quand même réussi le pari de la transmission... sauf que ce n'est pas le Café Clochette qui va continuer... c'est la vie dans cette maison. Et là ça ne sera pas de la survie, mais de la vraie vie bien vivante, joyeuse et musicale. A ceux qui reprennent cette maison, je souhaite en toute amitié une belle vie dans cette maison que j'ai aimée. Ils ont des étoiles dans les yeux.
Si j'ai le courage, peut-être, je viendrai ici vous raconter comment on dissout une entreprise. Je ne doute pas que ça soit très exaltant. Mais il y a plus joyeux : pour finir les choses en beauté, Aude et moi avons décidé de réouvrir le Café Clochette pendant deux ou trois semaines, au mois de juin. Ce sera l'occasion de revenir manger les petits plats que vous connaissez, goûter les derniers petits gâteaux, lézarder sur la terrasse... Ce sera aussi l'occasion pour nous d'écouler les derniers stocks (du thé, des livres d'occasion pour enfants, les derniers jouets en bois...) et de faire ce que nous avions toujours rêvé de faire sans jamais en prendre la liberté. Surprise... Ca va pétiller, je vous le dis.
J'ai passé deux semaines extraordinaires d'angoisse, de changements de coeur, d'espoirs insensés, de lâchers prise. J'ai rencontré des gens étonnants. J'ai répondu à des questions idiotes. J'ai pleuré après le départ de certains qui venaient visiter cette maison pour l'acheter, comme si c'était une pomme de terre au marché qu'on soupèse avant de la jeter dans le sac. Certains faisaient du tourisme. Certains voulaient un placement. Certains cherchaient quelque chose sans savoir quoi. D'autres avaient des étoiles dans les yeux.
Parmi ceux qui se disaient intéressés par la reprise du Café Clochette, j'ai tout vu. "Oh vous inquiétez pas, quand les enfants seront couchés je ferai une quiche ou deux, ça ira très bien". "Mon mari fait très bien la cuisine chinoise". "Ouais, j'aime bien les enfants, surtout quand ils rentrent pas chez moi... enfin je veux dire... si si, en fait j'aime bien les enfants." "Mais si je ferme au bout de trois mois, c'est pas grave ?" "Il y a une employée ? ah zut, comment on fait pour virer quelqu'un ?" "Si je sais faire la compta ? ah oui, je manage une équipe de quatre personne, alors vous voyez !" "Mais pourquoi vous avez rien fait pour faire monter le chiffre d'affaire, ça doit pas être si compliqué quand même, je sais pas, faut ouvrir plus, non ?" Il y avait des retors, des naïfs, des rêveurs. Des enthousiastes à qui il aurait fallu quelques semaines de plus pour la réflexion... et qui auraient bien pu y arriver, si j'avais eu ces quelques semaines. Des fauchés aussi, qui espéraient que mon grand désir de voir survivre l'affaire me ferait offrir les murs à n'importe qui. Et vous savez quoi ? c'était presque vrai. Il y a eu quelques jours où je voulais juste passer la main et voir survivre le Café Clochette.
Il a fallu d'autres chocs du réel, comme dirait l'autre, pour réaliser que c'était impossible. Il y a eu, heureusement, des messages de soutien, des gestes d'amitié, une grande énergie déployée autour du Café Clochette. C'est bien ; c'est bien qu'on sache, tous, que cet endroit remplissait un besoin et qu'on ne doit pas se résigner à ce que rien de ne vienne prendre sa place. Un lieu qui reçoit des enfants, des familles, qui permet de créer des liens, de découvrir, de se reposer parfois, c'est indispensable. Que les pouvoirs publics le sachent, c'est important ; que ceux qui protestent sachent qu'ils sont nombreux à vouloir quelque chose, même sans savoir quoi précisément, c'est indispensable.
Ce ne sera pas, plus, au Café Clochette. Ce sera ailleurs. Quant à moi, finalement, j'ai peut-être quand même réussi le pari de la transmission... sauf que ce n'est pas le Café Clochette qui va continuer... c'est la vie dans cette maison. Et là ça ne sera pas de la survie, mais de la vraie vie bien vivante, joyeuse et musicale. A ceux qui reprennent cette maison, je souhaite en toute amitié une belle vie dans cette maison que j'ai aimée. Ils ont des étoiles dans les yeux.
Si j'ai le courage, peut-être, je viendrai ici vous raconter comment on dissout une entreprise. Je ne doute pas que ça soit très exaltant. Mais il y a plus joyeux : pour finir les choses en beauté, Aude et moi avons décidé de réouvrir le Café Clochette pendant deux ou trois semaines, au mois de juin. Ce sera l'occasion de revenir manger les petits plats que vous connaissez, goûter les derniers petits gâteaux, lézarder sur la terrasse... Ce sera aussi l'occasion pour nous d'écouler les derniers stocks (du thé, des livres d'occasion pour enfants, les derniers jouets en bois...) et de faire ce que nous avions toujours rêvé de faire sans jamais en prendre la liberté. Surprise... Ca va pétiller, je vous le dis.